dimanche 1 juin 2014

QU’EST-CE QUE LA STRATEGIE « REDUCTION DE LA VIOLENCE COMMUNAUTAIRE (RVC) » ?


Qu’est-ce que la Stratégie « Réduction de la Violence Communautaire (RVC) » ?

Par Jean Laforest Visene, M.A.

 La stratégie ‘Réduction de la Violence communautaire fait partie de ce qu’on appelle : « seconde génération du Programme DDR » des Nation Unies. Elle est spécifique par rapport aux besoins des milieux en situation de violence aigue. En effet, son but n’est pas différent des programmes de type DDR Traditionnel à savoir : « Supporter le processus de paix, contribuer à créer un espace politique stable et un environnement sécuritaire » (1).

1.       Différences entre DDR classique et DDR seconde génération

Il y a trois différences fondamentales entre un programme DDR classique et un DDR de seconde génération, incluant la stratégie  Réduction de la Violence Communautaire. Ce sont :

·         La première se trouve au niveau de la stratégie d’intervention : Alors que le DDR classique privilégie une approche institutionnelle, la seconde génération : Réduction de la Violence Communautaire, comme son nom l’indique privilégie l’approche communautaire ayant donc la communauté comme le centre de ses actions. L’action se résumerait ainsi : « Tout pour et par la communauté ». C’est la communauté qui connait ses problèmes de sécurité, c’est elle qui connait les remèdes et c’est elle qui détermine quelle est l’appui externe nécessaire pour y parvenir.
 
·         La deuxième différence est le cible privilégié : Tandis que le DDR classique adresse le problème de la violence engendre par des groupes, belligérante, clairement identifiés et organisés, ayant un système de commandement avec qui on peut engager un processus de DDR, qui pourrait signer un accord de paix avec l’autre partie opposée, la seconde génération, quant à elle, adresse le problème de la violence engendre par : Des groupes armés indisciplinés ; des éléments armes qui fonctionnent en solo pour satisfaire leur besoins de base ; des jeunes à risque ou vulnérables ;  les adolescent sans tuteur pouvant être manipuler dans le cycle de la violence.

·         La troisième différence est le bénéficiaire principal du programme : Tandis que dans un programme DDR classique le bénéficiaire est le combattant et ses associés, dans le cas du DDR de seconde génération, c’est plutôt la communauté qui est le bénéficiaire. Le bénéfice est donc partagé. Cela évite aussi la critique qui fait savoir que le programme DDR ne fait que récompenser que les bourreaux, des gens qui ont fait des choses mauvaises tandis que, ceux qui en ont souffert ne sont pas prise en considération. Certains pensent même que le fait que le principal bénéficiaires est le bénéficiaire lui-même  est un incitatif pour que des gens cherchent à se procurer d’une arme pour en pouvoir devenir bénéficiaire.
 
2.       Quand le DDR seconde génération devient la panacée du DDR classique !
Il arrive parfois que le DDR classique n’est pas du tout possible, soit parce que les conditions politiques ne le permettent pas, soit en raison de la nature des bandes armée. C’était le cas, par exemple en Haïti, où la violence n’était entretenue que par des gangs armés composés en particulier de jeunes exploitant la violence comme une ressource pour satisfaire leur besoin. Il n’y avait pas d’interlocuteur, il n’avait pas de motivations politiques clairement exprimées, et non plus la possibilité de signature d’un accord de paix entre des groupes opposés.

Dans des situations similaires, à celles mentionnée, il reste comme panacée que la stratégie de réduction de la violence communautaire qui offre la possibilité de diminuer progressivement l’emprise des groupes armés sur la population. D’autant que cette stratégie donnent les moyens pour identifier, plus clairement les besoins des groupes armés communautaires, d’identifier leurs motivations et leurs intérêts, leur capacité et la manière de diminuer progressivement leur influence sur les communautés ou elles sont installées.

Idéalement, le travail de conscientisation et de responsabilisation active de la communauté peut ouvrir la porte à un nouveau type de désarmement que l’on appellerait le désarmement communautaire. C’est le cas, en Haïti où des jeunes avaient choisi de remettre, volontairement, leurs armes, sans exiger aucune contrepartie. Certainement après, ils ont été canalisés vers des projets de formation professionnelle de la RVC afin qu’ils puissent recevoir un accompagnement a la réinsertion communautaire.

Faudra-t-on reconnaitre que la stratégie “Réduction de la Violence Communautaire” Ressemble à la phase Réinsertion / réintégration dans un cadre de DDR classique. Mais en raison des faiblesses observées dans le passé dans l’exécution de cette phase, on peut compter sur la stratégie réduction de réduction de la violence communautaire pour être complémentaire à la phase réinsertion / réintégration d’un DDR classique, si les deux sont possibles dans un contexte de mission de maintien de paix.

3.       Avantage et limite de la stratégie Réduction de la violence communautaire
Un avantage que nous estimons judicieux de signaler de la stratégie réduction de la Violence Communautaire sur le DDR classique, est qu’elle offre la possibilité de lier le programme à des stratégies plus larges de consolidation de la paix et de développement. Ensuite, elle est à cheval entre le DDR classique et la Réforme du Secteur de Sécurité (RSS). De ce fait elle donne de plus grande opportunité de stratégie de sortie plus pérenne.

Notons que la stratégie « Réduction de la violence communautaire » a été initiée, pour la première fois en milieu « Peace Keeping Mission » des Nations Unies, en Haïti entre 2007. Mais le programme a pris véritablement une extension vers les années 2010. Les évaluations du programme, conduites par des partenaires d’évaluation externe, montrent qu’il a eu certains petits problèmes durant sa période d’installation entre 2007 et 2009. Mais ces problèmes ont été bien ficelles à partir de 2010 (2). Actuellement un programme similaire, adapté, est en train d’être testée au Soudan du Sud, au Congo et en Côte-d’Ivoire. Notons que la Banque Mondiale a aussi fait une expérience similaire dans un programme adressant la problématique des jeunes à risque et/ou associés à la violence en Timor-Leste (3).

En termes de limite, la stratégie Réduction de la Violence Communautaire n’adresse pas les autres formes de violence supra-communautaire, telle que la violence institutionnelle ou d’Etat, le grand banditisme, l’émotionnel et le passionnel et autres. Comme son nom l’indique, elle adresse les types de violence dont leurs germes sont ancrés soient des pratiques communautaires/ socio-culturelles, soient lies à des carences et ou des besoins sociaux des membres  la communauté. Voilà pourquoi elle appuie le développement au sein des communautés une culture favorable à la paix et à la résolution pacifique des conflits et aussi elle aide à la satisfaction de certains besoins de base qui sont des vecteurs de la violence communautaire.

4.       En guise de conclusion
Le processus Réduction de la Violence communautaire n’est pas, une fois pour toute, acquis, conquis, et constaté. Donc, il n’existe pas une formule « ceteris paribus » comme si « toute chose étant égale ailleurs, une solution passe-partout sera appliquée. Voilà pourquoi il revient toujours aux acteurs de comprendre le concept, d’analyser la situation problématique et de définir une stratégie adaptée.  Dans les résolutions des Nations Unies où l’on propose la mise en œuvre de la stratégie Réduction de la Violence Communautaire on insiste sur le fait que l’équipe de la mission doit aider le gouvernement à définir une stratégie Réduction de la Violence Communautaire et à lui donner l’appui en expertise pour la mettre en œuvre. Le fait même d’insister dans les résolutions que  les objectifs et priorités des Nations Unies et, partant, de sa configuration, ses activités et ressources connexes devraient être adaptés au fil du temps à la situation sur le terrain » dénote la nécessité que les différents concepts des missions de paix doivent être analysés au fur et à mesure afin qu’ils soient adaptés au réel social global. D’où la nécessité aussi que le concept « Réduction de la Violence Communautaire » soit réactualisé périodiquement, en redéfinissant notamment ses éléments d’opérations et ses critères de choix.

Notes

(1) Department of Peacekeeping Operations,  SECOND GENERATION DISARMAMENT, DEMOBILIZATION AND REINTEGRATION, (DDR) PRACTICES IN PEACE OPERATIONS : A Contribution to the New Horizon Discussion on Challenges and Opportunities for UN Peacekeeping, http://www.un.org/en/peacekeeping/documents/2GDDR_ENG_WITH_COVER.pdf, © United Nations 2010,  380, Madison Ave, 11th Floor, New York, NY 10017, USA January 2010, page 3.
(2) Pour des détails sur le contenu programme voir: Jean Laforest Visene, « linkag Of the Community Reduction Violence approach in Haiti”, http://visenejl.blogspot.com/, mars 2014.
(3) Banque Mondiale (BM), “Timor Leste - Youth Development Project
http://www.worldbank.org/projects/P106220/timor-leste-youth-development-project?lang=en.

 Jean Laforest Visene
Sociologue, M.A. es Sc. Développement
Professeur à l’Université d’Etat d’Haïti (UEH)
E-mail : visenejl@gl.com
Web page : www.visenjl.blogspot.com

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